Sexe safe Conduites à risques relatives à la sexualité : de quoi parle-t-on exactement ?

Perrine Basset Fériot
Publié le 11-06-2024

En bref

  • Préjugés et fausses idées sur la sexualité persistent auprès des jeunes entrainant parfois des conduites à risque, notamment sous l’empire de substances.
  • Alors que les infections sexuellement transmissibles augmentent, le préservatif et le dépistage demeurent essentiels.
  • Pour des relations sexuelles safe et consenties, il faut bien se connaitre et parler régulièrement avec son partenaire.
Sur les 21 cours d'éducation sexuelle prévus à l'année, les élèves n'en bénéficient que de 2,7 en moyenne.
Sur les 21 cours prévus tout au long de la scolarité, les élèves n’en bénéficient que de 2,7 en moyenne selon une enquête du collectif NousToutes. Crédit : Canva
« Les cours d'éducation sexuelle devraient nous donner des clés pour comprendre lorsqu’on n’est plus dans une relation saine », estime Mariama, étudiante. Crédit : Laura El Feky, Alicia Trotin - CIDJ
Infographie : 23 % des 15-24 ans considèrent la pornographie comme une aide pour les premiers rapports sexuels.
23 % des 15-24 ans considèrent la pornographie comme une aide pour les premiers rapports sexuels. Crédit : Fatmata Camara - CIDJ
Il existe un numéro vert Sexualités, contraception, IVG accessible gratuitement au 0 800 08 11 11. Crédit : Ministère de la Santé et de la Prévention
Infographie : les infections sexuellement transmissibles augmentent en France et en Europe
Les infections sexuellement transmissibles augmentent en France et en Europe. Crédit : Fatmata Camara - CIDJ
Aubin, 24 ans a entamé un parcours de soin pour venir à bout du chemsex qui « a failli lui coûter la vie » selon ses propres mots. Crédit : Francetv slash
« Les étudiants sont plus à risque car ils sont jeunes et sont à un moment de leur vie om ils peuvent expérimenter certaines choses sur le plan sexuel », affirme Guillaume Conort, médecin généraliste à au service de santé étudiante à Bordeaux. Crédit : Espace santé étudiants Bordeaux

Aller vers les jeunes pour les informer sur la sexualité

Dans l’ancienne salle des mariages du 1ᵉʳ arrondissement de Paris, Anaïs, Isore et Julia s’activent. À l'occasion de la semaine nationale de la santé sexuelle, elles parcourent les couloirs de Quartier Jeunes (QJ), un lieu d'accueil du public dont fait partie le CIDJ. Sur leur chariot, des préservatifs (masculins comme féminins) côtoient les flyers sur le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Ici, le mot « sexe » n’est pas tabou, et le dépistage un acte primordial. Leur truc à elles, c’est « d’aller vers ». Anaïs, chargée de prévention pour l’association Migration santé, explique : « Notre démarche consiste à aller à la rencontre des jeunes pour leur parler de sexualité ». Selon  l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la santé sexuelle est caractérisée comme « une approche positive et respectueuse de la sexualité et des relations sexuelles, ainsi que comme la possibilité de vivre des expériences sexuelles agréables et sûres, exemptes de coercition (action de contraindre), de discrimination et de violence ». Car lorsqu'ils vont chercher l'information par eux-mêmes, les jeunes passent souvent par les sites pornographiques. Les chiffres en témoignent : selon l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), 30% des mineurs regardent des sites pour adultes. Et ce, dès un très jeune âge : dès 12 ans, plus de la moitié des garçons se rend en moyenne chaque mois sur ces plateformes.

La tendance à consulter des sites pornographiques n’étonne pas Isore pour qui « l’école ne dispense pas assez de cours d’éducation sexuelle ». D’ailleurs, sur les 21 cours prévus tout au long de la scolarité, les élèves n’en bénéficient que de 2,7 en moyenne selon une enquête du collectif NousToutes. On y apprend aussi que la majorité des thèmes abordés lors des séances réalisées provient du programme de SVT. Soit une information loin de répondre aux préoccupations des jeunes. C’est pourquoi, dans le Centre de soins, d'accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA), où elle exerce, la jeune femme s’attache à prodiguer un maximum de conseils à ce public. Objectif ? Contrer les idées reçues. « La première chose à faire est de se connaître soi-même, et ses limites », précise Julia, qui travaille, elle aussi, dans un CSAPA. « Est-ce que je bois, prends de la drogue et ai un rapport sexuel parce que j’en ai vraiment envie ? Ou est-ce que je le fais par pression sociale ? » Sachant que la sexualité à risque se définit comme l’ensemble des conduites amenant à une prise de risques pour la santé des partenaires sexuels : cela inclut les rapports non protégés, la prise de substances ou les rapports sous la contrainte ou la violence. De ces agissements résultent une plus grande menace de contamination, d’infections sexuellement transmissibles (IST) et de grossesses non désirées.

Un rapport, publié le 7 mars par le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC), montre que les infections bactériennes de la chlamydia ont augmenté de 16 % entre 2021 et 2022 en France, tandis que la hausse a atteint 48 % pour la gonococcie et 34 % pour la syphilis. Sur le domaine pratique, se faire régulièrement dépister et disposer de préservatifs chez soi s'avère essentiel. « Il ne faut pas oublier que lorsque l'on ne met pas de préservatif, on est responsable de soi, mais aussi du danger qu'on fait encourir à l'autre », insiste Julia. Lorsqu’elle, ou sa collègue, reçoit des jeunes en consultation pour parler d’addictions, le sujet de la sexualité est souvent abordé. « Mélanger les drogues et le sexe n’est pas une nouvelle pratique, explique Isore. Mais les applications de rencontres facilitent ce genre de comportement ». Les deux médiatrices regrettent ainsi que des préjugés persistent : « Dans les esprits, la consommation d’alcool ou de tabac n’est pas nocive, car elle est vue en France comme un acte culturel, continue Julia. Alors qu’être désinhibé avant un rapport sexuel ne permet pas de prendre des décisions éclairées et peut nous faire accepter des choses que l’on regrettera ensuite ». Et de conclure par une parole de bon sens qui manque souvent : « Il faut parler avec son ou sa partenaire, savoir ce qu'on a envie et garder en tête que l'on peut toujours changer d'avis au dernier moment ».

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