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Bientôt une nouvelle loi pour encadrer le travail des youtubeurs mineurs
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Les chaînes pour enfants ou celles tenues par des mineurs se multiplient sur Youtube. Alors que l'activité de ces jeunes n'est pas réglementée, une loi est sur le point d'être adoptée par le Parlement pour combler ce vide juridique. Quelles sont les règles à respecter sur Youtube ? Cidj.com fait le point.
Ils s'appellent Néo, Swan, Kalys, Athéna ou encore Ilyana et vous les connaissez peut-être. Ils ont tous un point commun : ils ont moins de 18 ans et sont youtubeurs. Certains cumulent plusieurs millions d'abonnés et autant de vues sur leurs vidéos. Qu'il s'agisse d'unboxing (ouverture de colis), de dégustations, de pranks (canulars) ou encore de daily vlogs (blogs vidéo), ces chaînes ont un vrai succès sur Youtube. Tantôt adorées, tantôt détestées, elles sont souvent décriées pour travail dissimulé. Mais alors, la création de vidéos sur Youtube relève-t-elle d'une activité de loisir ou d'un travail ? La question a été posée en décembre 2019 dans le cadre d'une proposition de loi présentée devant l'Assemblée nationale qui vise à encadrer cette activité et éviter les dérives.
Faire des vidéos sur Youtube : travail ou loisir ?
Voir des mineurs déballer des cadeaux, faire du gaming ou surfer sur les nouvelles modes (handspinner, slime, orbeez...) est devenu, depuis quelques années, monnaie courante sur Youtube. En cumulant, pour certaines, plusieurs milliers voire millions de vues, ces chaînes connaissent un véritable succès. Pour proposer des vidéos aux internautes, certains jeunes semblent répondre à des consignes données (bien se tenir, sourire, ne pas dire de gros mots, apprendre l'introduction des vidéos par cœur...), la plupart du temps, par leurs parents qui deviennent des caméramans, monteurs et producteurs, ou par les marques avec lesquelles ils réalisent des partenariats.
Même si, pour les adultes, il semble acquis qu'être youtubeur est un "vrai" travail, quand il s'agit d'enfants ou d'adolescents, les parents invoquent souvent une activité de loisir. Mais qu'en est-il réellement ? Pour Thomas Rohmer, président de l'association Open (Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique), « à partir du moment où l'on retire d'une activité des revenus importants, on ne se situe plus dans le loisir mais dans un travail. Pour nous, ces enfants travaillent pour le compte de leurs parents ».
Depuis 2018, l'association a alerté sur le vide juridique qui existe sur la situation de ces jeunes youtubeurs. « En France nous disposons d'un régime protecteur pour les enfants du spectacle. Aujourd'hui, les mineurs youtubeurs n'entrent pas dans le cadre de ce régime. C'est pour cela que nous souhaitons une extension du droit du travail » explique Thomas Rohmer.
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Non, sur Internet, des règles spécifiques s'appliquent. Sur Youtube, vous ne pouvez pas posséder de chaîne si vous avez moins de 13 ans, et ce, même si vos parents vous y autorise. Si, malgré tout, vous réalisez du contenu alors que vous avez moins de 13 ans, sachez que vous êtes dans l'illégalité.
De 13 à 15 ans, vous avez la possibilité de posséder une chaîne à condition que vous ayez l'autorisation de vos parents.
À partir de 15 ans, vous disposez de la majorité numérique et êtes libre de posséder votre chaîne Youtube, avec ou sans l'accord de vos parents.
Une nouvelle loi pour encadrer le travail des youtubeurs mineurs
En décembre 2019, le député Bruno Studer a présenté devant l'Assemblée nationale une proposition de loi visant à donner un cadre juridique au travail de ces enfants et adolescents. « Le plus difficile est d'établir l'existence d'une relation de travail avec ou non la présence de consignes. La proposition de loi donne plusieurs critères qui permettront de déterminer la présence d'une telle relation » précise le député.
Toutes les chaînes ne seront donc pas concernées par cette loi. Pour qu'elles le soient, « ce qui va être pris en compte, c'est le temps passé à créer des vidéos et/ou le montant des revenus liés à cette activité » explique Florence Chérigny, maître de conférence à la faculté de droit de Poitiers. « Ces deux critères, qui ne sont pas cumulatifs mais alternatifs, permettront de déterminer s'il existe ou non une relation de travail ».
« Qui dit relation de travail, dit contrat de travail avec des règles précises à respecter » martèle Bruno Studer. Concrètement, si une telle relation est établie entre le mineur et ses parents, ces derniers devront déposer une demande d'autorisation administrative pour exercer cette activité. La relation professionnelle implique aussi que les revenus engendrés par la chaîne seront placés à la Caisse des dépôts et consignation jusqu'à la majorité du mineur, qui pourra alors en disposer librement.
« Attention il ne s'agit absolument pas de diaboliser Youtube ou le fait de créer des vidéos sur cette plateforme » rappelle Thomas Rohmer, « mais de rappeler qu'on ne peut pas faire ce qu'on veut avec ses enfants. Les dérives existent vraiment. Pour certaines chaînes, au vu du nombre important de vidéos réalisées tous les mois, il est certain que les mineurs n'exercent plus d'autres activités extra-scolaires que celle qu'ils exercent sur Youtube ».
Même sans relation de travail, les youtubeurs mineurs sont protégés
Au-delà des chaînes d'unboxing, on trouve des chaînes de daily vlogs sur Youtube dans lesquelles les parents se filment et filment leurs enfants au quotidien. La présence d'une relation de travail pour ces enfants et adolescents étant plus difficile à prouver, la proposition de loi entend renforcer la protection des données personnelles de ces mineurs.
Une donnée personnelle est une information qui permet d’identifier directement ou indirectement une personne. Il peut, par exemple, s'agir de son nom, son prénom, son adresse mail, mais aussi de photos ou vidéos dans lesquelles elle apparaît.
S'agissant de la protection des données, deux textes complémentaires s'appliquent en France : la loi Informatique et liberté et le RGPD (le règlement général sur la protection des données personnelles). « Ces deux textes ouvrent plusieurs droits » explique William Gilles, directeur d'un master 2 en droit des données à l'université Paris 1. « Parmi ces droits, on retrouve le droit d'accès, c'est-à-dire le fait de demander quelles sont les données que l'on possède sur vous, un droit de rectification en cas d'erreur et un droit à l'effacement ».
Sur Youtube et les réseaux sociaux : faciliter le droit à l'oubli
Plus communément appelé droit à l'oubli, l'effacement consiste à faire supprimer vos données collectées. « Dans le régime général, pour demander l'effacement de vos données, il faut prouver qu'elles vous portent préjudice » précise William Gilles. « Mais lorsqu'il s'agit de données sur un mineur, aucune preuve de préjudice ne doit être apportée ». Actuellement, seuls les détenteurs de l'autorité parentale, peuvent faire la demande d'effacement. Si vous êtes majeur et que des données de vous mineur sont collectées, vous pouvez également en demander l'effacement sans préjudice à prouver.
Si la proposition de loi est adoptée, l'effacement pourra être demandé par le mineur lui-même. Pour Bruno Studer, « le droit à l'oubli est très important pour les mineurs. Nous sommes parfois en présence de cas où de jeunes personnes sont exposées, voire surexposées, sur Internet. Nous devons leur permettre la suppression de ces données sans qu'ils aient à attendre leur majorité ».
Concrètement, si vous êtes présent (en tant que mineur) sur de nombreuses vidéos dans le cadre d'une chaîne familiale sur Youtube, vous pourrez demander leur suppression. Sachez que la proposition de loi parle de "plateformes de partage de vidéos" et comprend donc aussi les vidéos présentent sur tous les réseaux sociaux (Instagram, Snapchat, Tik Tok...).
La proposition de loi a été votée à l'unanimité devant l'Assemblée nationale en février 2020. « Nous espérons un vote définitif avant l'été pour une entrée en vigueur d'ici la fin de l'année » conclut Bruno Studer.
En janvier 2020 une loi est apparue dans le quotidien des youtubeurs : la loi Coppa. Avec elle, Youtube oblige les chaînes qui s'adressent à des enfants à se manifester, empêchant ainsi l'exploitation des données personnelles des mineurs pour réaliser de la publicité ciblée et les commentaires sous les vidéos. Cette loi est une loi américaine qui vise à protéger les données personnelles des mineurs qui consomment des vidéos. Youtube, entreprise américaine, a dû se mettre en conformité avec cette réglementation après avoir été condamné à payer une lourde amende en 2019 et a décidé d'appliquer la loi non seulement aux États-Unis mais aussi en France et dans toutes ses filiales dans le monde.
Marine Ilario © CIDJ
Article mis à jour le 23-03-2020
/ créé le 23-03-2020
Crédit photo : Kon Karampelas - Unsplash