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Clichés sur la segpa : une pétition contre la dévalorisation des élèves
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Benoit Garon, professeur dans un collège de la Creuse a lancé une pétition contre la dévalorisation des élèves en section d’enseignement général et professionnel adapté suite à la diffusion de la bande annonce du film « Les segpa » dans lequel les élèves sont dépeints de manière péjorative.
Plus de 110 000 personnes ont signé la pétition de Benoit Garon, enseignant en segpa dans un collège de la Creuse. Lancée il y a deux mois, elle dénonce le portrait dressé des élèves en section d’enseignement général et professionnel adapté dans le film « Les segpa » dont la sortie est prévue en avril 2022. « Quand j’ai vu le teaser j’ai halluciné » se souvient Benoit Garon. « On y voit des élèves complètements débiles et des professeurs démissionnaires ». Loin d’être contre le film en lui-même, Benoit Garon souhaiterais que les élèves de segpa ne soient pas stigmatisés. « Il y a déjà eu de nombreux films caricaturaux sur l’école comme par exemple "les profs" ou encore "les sous doués". Mais le titre de ces films sont généralistes alors que pour les segpa, on cible précisément une catégorie d’élèves. C’est ça qui me dérange ».
Un film vecteur de clichés sur les segpa
Le film « Les segpa » est tiré d’une série à succès du même nom, diffusée sur Youtube et qui cumule plusieurs millions de vues par épisodes.
Classe de cancres, sans avenir, où l’on n’apprend rien. Les stéréotypes sur la segpa ne datent pas d’hier et ont la vie dure. « Le terme segpa est devenu un terme péjoratif alors que les segpa ne sont pas ce qu’on dit d’elles » déplore Benoit Garon. Dans la bande annonce du film, on peut d’ailleurs entendre des phrases comme "c’est des segpa, c’est des cancres", "ils vont ruiner la réputation de notre établissement", "depuis la nuit des temps les segpa sont traités d’imbéciles", "ça va changer ça ? Non vous serez toujours des imbéciles mais des imbéciles avec un diplôme".
De plus, « on voit dans le teaser que l’âge des élèves n’est même pas respecté. En segpa on est collégien donc on a entre 11 et 15 ans. Dans le film, on voit que ce sont clairement des jeunes adultes » remarque Benoit Garon.
110 000 signatures en quelques semaines
Le problème, c’est que ces clichés font beaucoup de mal aux élèves qui étudient en segpa. « Les élèves de segpa, qui peuvent déjà subir du harcèlement, des moqueries, de l’exclusion dans les établissements scolaires, sont encore martyrisés et stigmatisés » peut-on lire sur la pétition. Même si « tous les élèves ne sont pas touchés de la même manière par ces clichés » reconnaît le professeur, « certains sont très sensibles à ça et le prennent très mal ».
Parmi les 110 000 signataires « il y a beaucoup d’enseignants en segpa, d’anciens élèves et des parents d’élèves » note Benoit Garon. A l’instar de Sophie Deniau qui commente par exemple : « Je me bats tous les jours pour aider mes élèves (de segpa) à avoir une meilleure estime d’eux-mêmes, à lutter contre l’idée souvent très négative qu’ils ont d’eux-mêmes » ou de David Martins qui raconte : « Parce que je n’oublierai jamais les larmes de l’enfant de 12 ans arrivant dans mon bureau après avoir tapé segpa sur Youtube ».
Sans demander un retrait du film, Benoit Garon souhaiterais que le titre soit changé au profit d’un titre plus généraliste. « J’ai envoyé des mails à toute la production, à la distribution et aux acteurs. Je n’ai eu aucune réponse. On ne pourra pas les obliger à changer le titre du film car ils se servent de la notoriété de la série sur Youtube ». Mais finalement, « mon objectif était surtout de montrer que les mots peuvent blesser et surtout montrer que la segpa représente une chance pour des élèves en difficulté » conclut le professeur.
Marine Ilario © CIDJ
Actu mise à jour le 11-03-2022
/ créée le 10-03-2022
Crédit photo : Taylor Wilcox - Unsplash