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Les maths et la réforme du Bac ne font pas bon ménage
- Ecoles d'ingénieurs
La réforme du bac et la crise sanitaire ont accru les difficultés en mathématiques des étudiants. Si les écoles d’ingénieurs et les classes prépa ont adapté dans l’immédiat leurs enseignements pour parer au plus pressé, elles demandent un rééquilibrage des maths au lycée.
« Parce que la puissance industrielle d’un pays ne peut progresser sans compétences scientifiques. Parce que les mathématiques sont incontournables pour la bonne compréhension de l’économie. Parce que la transition écologique et digitale réclame davantage d’ingénieurs. Parce que la réforme du lycée a fait chuter de 18 % les heures de mathématiques enseignées en terminale et en première. (…) Nous recommandons que le monde académique conjugue la formation mathématique, culture de rigueur, avec la nécessaire conversion des entreprises au digital et aux datas. » Par ces mots publiés dans une tribune, les patrons du CAC 40 ne cachent ni leur désarroi ni leur agacement face aux mesures prises antérieurement pour réduire le nombre d’heures d’enseignement des mathématiques. Résultat, le niveau en maths des nouveaux étudiants est en perte de vitesse. La faute au Covid et à la réforme du bac ? Tous ces jeunes présentent en effet la particularité d’avoir essuyé les plâtres du bac nouvelle mouture et d’avoir traversé une crise sanitaire sans précédent qui a dégradé les enseignements et le passage des épreuves du bac. Face à ce constat, les établissements d’enseignement supérieur s’adaptent tout en réclamant le retour à plus de maths, de physique et de sciences de la vie au lycée.
Réforme du bac : moins de matheux et de matheuses
En supprimant les filières S, ES et L, l’idée était de supprimer la prédominance de la filière S comme voie de tous les possibles et de permettre à chaque élève de personnaliser son parcours via un choix de spécialités et d’options en terminale. Ainsi, en terminale, certains élèves peuvent désormais n’avoir qu’un tronc commun de 2 h d’enseignement scientifique (soit une heure de maths par mois), quand d’autres peuvent choisir entre 3 h de maths (options mathématiques complémentaires), 6 h de maths (spécialité mathématiques seule) et jusqu’à 9 heures pour les plus « accros » (spécialités maths + options maths expertes).
Si cette réforme a eu pour effet de renforcer le niveau en mathématiques de ceux qui choisissent la spécialité maths expertes (13 % des élèves), elle a induit aussi une baisse du nombre d’élèves bénéficiant d’un enseignement en mathématiques : « 59 % des élèves suivent un enseignement de mathématiques en terminale, ils étaient 90 % avant la réforme » selon l’Association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public.
Cette baisse est encore plus significative chez les jeunes filles. En terminale seulement 25 % des filles suivent un enseignement de mathématiques de plus de six heures contre 45 % avant la réforme. « Les filles se ferment les portes de la plupart des études scientifiques qui mènent aux emplois et aux carrières parmi les mieux valorisés » s’alarme l’Union des professeurs de classe préparatoire.
Entrée en études supérieures : nécessité d’adapter les programmes
Pour faire face à cette baisse de niveau en mathématiques, plusieurs établissements d’enseignement supérieur ont mis en place différents dispositifs (tests de niveau en mathématiques, cours de rattrapage, mentorat…) à la rentrée 2021/2022. Le CESI, école d’ingénieurs, propose ainsi à ses nouveaux entrants post bac ou post bac + 2 le test TOMIC (test for mathematics for integrated curricula). Morgan Saveuse, directeur des études de CESI École d’Ingénieurs en explique le principe : « Dans les premières semaines de la rentrée, nos élèves ingénieurs vont passer ce TOMIC qui balaie tout le niveau post-bac attendu, avec de la trigonométrie, des dérivées, des intervalles, des intégrales… Un examen de trois heures qui les testera sur ces différentes parties du programme ». En fonction de leurs résultats, les élèves se voient proposer des summer schools adaptées en fonction des formations choisies. L’INSA, autre école d’ingénieur, face au niveau très hétérogène des nouveaux étudiants, a mis en place des cours de chimie, physique et biologie pour apporter les notions nécessaires non acquises en terminales.
Des solutions temporaires avant de prochains réaménagements du « bac Blanquer » ? Lors du débat de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron annonçait déjà la ligne directrice « Il faudra remettre des mathématiques jusqu’au baccalauréat » dans le tronc commun. Le prochain ou la prochaine ministre de l’Education nationale pourra appuyer ses réflexions sur un récent rapport qui liste bon nombre de propositions pour redonner aux enseignements scientifiques plus de poids.
Une chose est sûre, le déclassement hexagonal n’a pas attendu la crise du Covid-19 et la réforme du Bac. Le classement TIMMS de 2019 (Trends in International Mathematics and Science Study) révèle que les élèves de 4e d’aujourd’hui ont le même niveau que les enfants de 5e de 1995. Quant aux petits Français de CM1, ils enregistrent la moins bonne performance de toute l’Union européenne.
La rédaction © CIDJ
Actu mise à jour le 29-04-2022
/ créée le 29-04-2022
Crédit photo : Antoine Dautry / Unsplash