Actualité La Cour des comptes préconise d’élargir les voies de recrutement au métier d’enseignant
En bref
- La juridiction financière et administrative recommande notamment de diversifier le recrutement des enseignants au profit d’un public en reconversion professionnelle et d’augmenter la durée de formation des contractuels avant leur entrée en fonction.
Comment rendre plus attractive la profession d'enseignant ? C’est à cette question que la Cour des comptes s’est attelée à répondre. Dans un rapport du 1er février 2023, la haute cour tente de cerner les raisons de la pénurie des professionnels de l’éducation et d'y apporter des solutions.
1 100 postes manquants chaque année
En moyenne annuelle, sur une période courant de 2017 à 2021, la Cour du palais Cambon évalue à 1 110 le nombre de postes manquants aux concours externes d’enseignant. Et ça ne s’est pas arrangé depuis : en 2022, le nombre d’emplois à pourvoir était supérieur au total des admissibles au certificat d'aptitude au professorat de l'enseignement du second degré (Capes) dans plusieurs disciplines.
Ainsi, en mathématiques, 816 candidats étaient admissibles pour 1 035 postes disponibles. Au Capes d’allemand, sur 215 postes ouverts, on ne comptait que 86 admissibles. Globalement, les aspirants professeurs boudent les lettres classiques, les sciences industrielles ou encore les biotechnologies.
Une désaffection européenne
Face à ce désamour pour le « plus beau métier du monde », selon la formule de Charles Péguy, l’Éducation nationale n’a d’autre alternative que de recourir au recrutement de contractuels. 4 500 précisément pour la rentrée 2022.
Et cette crise des vocations ne s’arrête pas aux frontières hexagonales. Selon le rapport d’Eurydice rendu public en 2021, tous les pays européens manquent de professeurs.
Aussi la Cour des comptes insiste sur un point : une simple revalorisation des salaires n’enrayera pas cette chute d’attractivité pour une profession en crise. Elle préconise d’élargir les voies de recrutement avec les troisièmes concours ouverts aux personnes justifiant d’au moins cinq années d’expérience dans le secteur privé. L’idée étant d’attirer des profils en reconversion professionnelle.
La haute cour recommande aussi de « construire avec les acteurs universitaires et académiques un continuum de formation sur cinq années conduisant au professorat des écoles, sur la base de licences professionnalisantes spécifiques permettant l’accès au master MEEF (Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation).
Revalorisation salariale et « pacte » avec le ministère
Pour les enseignants contractuels, la Cour des comptes préconise la mise en place d’une formation obligatoire d’au moins une semaine avant une première prise de poste. Cette mesure répond notamment à la problématique des enseignants contractuels recrutés à la rentrée 2022. À ce moment et avant de prendre leur fonction, ils ne disposaient que d’une formation de quatre jours pour se former au métier.
Une semaine après la publication de ce rapport, la question de la rémunération des enseignants a été abordée par le ministre de l’Éducation nationale, Pap Ndiaye, déclenchant par là même une polémique. Le 8 février 2023, il a ainsi présenté aux syndicats enseignants le détail de son « pacte » : une augmentation de 10% du salaire en échange de 72 heures supplémentaires à effectuer sur une année.
Un « donnant-donnant » proposé sur la base du volontariat. « Cela ne répond absolument pas aux problèmes des enseignants ni à la perte d’attractivité, dénonce dans Le Monde Laetitia Aresu du SGEN-CFDT. On leur demande d’en faire davantage alors que le travail déjà effectué et la complexification du métier ne sont toujours pas reconnus. »
La concertation se prolongera jusqu'au 6 mars, date de la prochaine réunion entre ministère et organisations syndicales, avant une possible entrée en vigueur de la revalorisation salariale dès septembre 2023.