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Actualité Congé menstruel : après l’Espagne, la France ?

Odile Gnanaprégassame Odile Gnanaprégassame
Publié le 28-04-2023

En bref

  • Alors non, la question n’est pas encore à l’étude en France. Mais peut-être que l’exemple de l’Espagne - qui a récemment adopté un congé menstruel pris en charge par l’État - y contribuera ?
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Congé menstruel : après l’Espagne, la France ? Crédit : Pixabay

Justice sociale pour les uns, mesure discriminatoire pour d’autres… Une certitude, le congé menstruel ne laisse personne indifférent. Ce qui ravive le débat actuellement ? L’adoption en février dernier d'une loi instaurant un congé menstruel en Espagne. Dans l’Hexagone, une poignée d'entreprises ont déjà sauté le pas dont un géant de la grande distribution, Carrefour.

Seules les femmes actives souffrant des règles douloureuses sont concernées. En France, c’est le cas de près de 50 % des femmes d’après un sondage Ifop pour INTIMINA, réalisé en 2021. Un taux qui grimpe à 60 % chez les 15-19 ans, dont 20% déclarent avoir des règles très douloureuses. Visiblement pas suffisant pour envisager un congé menstruel à l’échelle nationale. D’abord, cela suppose de définir ce que sont des règles douloureuses. À partir de quel degré de souffrance une femme entrerait-elle dans le cadre de ce congé menstruel ?

Pour couper court à ces difficultés d'appréciation, les entreprises proposant le congé menstruel en France – La Collective depuis 2021, Louis design, Marédoc et Goodays depuis 2022 – ne demandent pas de justificatif médical. Il faut dire qu’il s’agit d’un jour par mois. Ces employeurs se targuent de faire confiance à leurs salariées pour ne pas abuser de ce système si elles ne vivent pas des menstruations douloureuses…

Rappelons que l’idée de départ consiste à réintroduire de la justice sociale. Les femmes dont la souffrance durant leurs règles les empêche de travailler se retrouvent à piocher dans leurs jours de congés pour s’absenter sans se justifier... Du point de vue de l'employeur qui, soulignons-le, prend entièrement à sa charge le financement de cette journée, une salariée au top de sa forme est plus productive que lorsqu’elle est en proie à des douleurs liées à son cycle.

Chez Louis design, même s'il reste possible de prendre ce congé le jour même, il faut remplir un tableau qui renseigne les dates des prochaines règles… On se félicite d’avoir mis en place un « environnement safe » où les femmes peuvent se sentir à l’aise sur la question. Mais quid de la séparation vie privée et vie professionnelle ? Un an après sa mise en application, trois salariées (sur les huit) y ont eu recours dont une à neuf reprises. L'entreprise en tire un bilan positif qu'elle met en avant sur son site internet.

En attendant, le moindre article consacré à ce sujet provoque son lot de commentaires. De la part d’hommes comme de femmes. Parmi elles, certaines estiment que le congé menstruel constitue une avancée majeure pour le droit des femmes. D’autres, au contraire, mettent en avant un possible risque de discrimination à l’embauche si la mesure était étendue au niveau national. Les femmes ne sont pas épargnées par les commentaires sexistes « pourquoi pas un congé pour aller chez le coiffeur ou faire du shopping ? », peut-on lire en ligne. « Les femmes ont des douleurs durant les règles depuis la nuit des temps »… Bref. Enveloppées dans des représentations sociales liées au genre féminin pleines de préjugés, les règles – et leurs implications – demeurent taboues.

Pourtant, peu de femmes vivent leurs menstruations de manière complètement sereine. Les douleurs qu’elles provoquent ne doivent pas être normalisées. Elles peuvent indiquer une maladie gynécologique comme l’endométriose. Alors, quel que soit votre âge, une consultation chez un spécialiste s’impose.

Lire aussi : Des initiatives pour lutter contre la précarité menstruelle chez les jeunes

Focus

Prise de conscience globale ?

Le PDG du groupe Carrefour, Alexandre Bompard, a annoncé le 19 avril 2023 que les employées atteintes d'endométriose pourront bénéficier d'un congé de maladie jusqu'à 12 jours par an. L’enseigne de grande distribution devient ainsi la première entreprise d’envergure à mettre en place cette politique. Cependant, seules les femmes reconnues handicapées en profiteront :  les salariées devront fournir un document justifiant leur reconnaissance de qualité de travailleur handicapé (RQTH), leur carte d'inclusion ou une attestation d'invalidité délivrée par la CPAM. Ces démarches administratives complexes et longues risquent de rendre cette mesure difficilement accessible pour la plupart des employées atteintes d'endométriose. Attention, cette mesure ne s'applique pas aux femmes souffrant de règles douloureuses, or la difficulté à diagnostiquer cette maladie entraîne souvent un délai important entre l'apparition des premiers symptômes et la confirmation du diagnostic. Cette initiative marque néanmoins le début d’une prise de conscience d’un grand groupe sur une maladie qui toucherait, selon l’INSERM, une femme menstruée sur dix. Si la mesure se limite pour le moment aux seules salariées exerçant en France, elle pourrait s’étendre prochainement aux autres filiales européennes. 

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