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AESH : un métier peu rémunérateur mais formateur

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AESH : un métier peu rémunérateur mais formateur

Miya et Andréa sont accompagnantes d’élèves en situation de handicap (AESH). Un métier, émotionnellement riche et économiquement pauvre, peu reconnu et pourtant indispensable. Pour rendre cette profession attrayante, il y a encore du chemin.

Il est temps de passer à autre chose. Après 9 années passées sur les bancs d’une école primaire aux côtés d’élèves en situation de handicap, Andréa, souhaite continuer à travailler dans le domaine de l'accompagnement mais plus en tant qu’AESH. La trentenaire a entamé des démarches pour obtenir le diplôme d’État d’accompagnant éducatif et social par une validation des acquis de l’expérience (VAE). Pour Miya - il s’agit d’un pseudonyme, l’interviewée ayant demandé de conserver l’anonymat -, 24 ans, le métier d’AESH n’est qu’une étape avant d’embrasser la fonction de juge pour enfants. Elle prépare activement le concours d'entrée à l'école de la magistrature. Les deux sont unanimes : si elles déplorent le manque de reconnaissance du métier, il n’empêche que l’accompagnement d’enfants en situation de handicap dans leur scolarité offre une formidable expérience humaine.

Construire une relation de confiance

« Ma mission, c’est de tout mettre en œuvre pour que les élèves que j’accompagne s’épanouissent sur le plan scolaire. Qu’ils ne trainent pas des pieds pour venir à l’école », explique Andréa, employée dans la même école primaire depuis ses débuts d’accompagnante. Elle aide 3 élèves, en CE1, CE2 et CM2, « par demi-journée en classe ». Le métier d’AESH requiert des savoir-être comme l’empathie et la bienveillance pour mettre en place une relation de confiance avec les élèves. Ce qui n’est pas souvent simple car la présence d’un AESH n’est pas toujours acceptée : « Durant ma formation, j’ai appris à échanger au mieux avec l’élève, à le comprendre et à réagir dans certaines situations, notamment lorsqu’il se met en colère », raconte Miya. L'année dernière, pour mettre en confiance un élève très réticent, elle lui propose un accompagnement personnalisé individuel. « Chaque semaine, durant une heure, nous travaillions bien sûr, mais nous parlions aussi de lui et d'autres choses. La situation a fini par se débloquer », se souvient-elle. Comme tous ses collègues, elle organise son travail à partir du projet personnel de scolarisation établit en amont par la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) pour définir les besoins de l’élève. À charge pour l’AESH d’apporter son soutien à l’élève, de l’aider à comprendre les consignes et à manipuler le matériel scolaire… À cet effet, il utilise des supports spécifiques, notamment visuels, pour garantir une meilleure compréhension du cours. Mais attention, il ne s’agit pas de l’assister mais au contraire de le laisser effectuer seul les tâches demandées. « En théorie, je dois adopter une posture de juste milieu, car ma mission est de favoriser l’autonomie de l’élève. En pratique, ce n’est pas si simple au quotidien », reconnaît la jeune femme. Également, elle estime ne pas être assez entendue par certains parents. « Il m'arrive de faire des recommandations basées sur ce que j'observe en classe dans le but d'améliorer la progression de leur enfant. C'est parfois mal accueilli. »

Contribuer à la progression scolaire des élèves

Au même titre que les autres professionnels intervenant auprès de l’enfant (psychologue, orthophoniste, représentant de la MDPH, enseignants, parents…), les AESH participent aux réunions pédagogiques sans pour autant tout connaître de la situation des élèves suivis. « Au fur et à mesure du temps passé avec eux, j’apprends à bien connaître leurs capacités et leurs besoins. C’est plaisant de les aider à trouver une méthodologie de travail. Mais je ne dois pas leur imposer quoi que ce soit, même si je pense que ce serait bénéfique pour eux. Je dois être à l’écoute de ce que souhaitent les élèves », indique Miya. « L’un des collégiens dont je m’occupe se repose beaucoup sur moi, c’est difficile de le faire participer, de l’impliquer dans le cours ». Une source de frustration pour la jeune accompagnante, qui a parfois l’impression d’être une baby-sitter. De son côté, Andréa en est convaincue, sa présence apporte quelque chose : « Même s’il y a des moments où les choses stagnent, et c’est normal, je constate la progression des élèves que j’accompagne. J’en réfère aux enseignants qui sont chargés de les évaluer. De mon côté, je fais mon petit bilan mensuel ». Accompagner le même élève tout au long de sa scolarité n’est pas la norme, et ce n’est pas pour lui déplaire. « J’ai moi aussi besoin de me confronter à d’autres élèves et à d’autres situations de handicap », déclare la jeune femme qui ne souhaite pas pour autant poursuivre ce métier. « Ce qui m’a fait tenir autant de temps ? C’est la conviction d’être utile aux enfants qui en ont besoin », ajoute Andréa. « C’est un métier de passion que j’aurais aimé continuer si les conditions d’exercice étaient réunies ».

AESH : Un métier qui ne paie pas

La jeune femme ne saurait être plus claire : le métier ne paie pas assez bien pour espérer en vivre. Non seulement la rémunération est calculée sur le smic horaire mais les contrats de travail ne sont proposés qu’à temps partiel, jusqu’à 24 heures par semaine en moyenne, et 31 heures dans le secondaire. Comme bon nombre d’AESH, pour joindre les deux bouts, Andréa cumule. Surveillante de cantine les midis, elle est aussi assistante de vie en centre de loisirs auprès d’enfants en situation de handicap, les mercredis et durant les vacances scolaires. Au niveau des congés, c’est là encore la portion congrue avec une petite semaine de vacances annuelles. « Aujourd’hui, j’ai besoin d’avoir un seul métier qui me permette vivre et de faire des projets dans ma vie personnelle », déclare-t-elle. « Je n’ai pas constaté d'évolution significative depuis que j’ai commencé en 2013 ». Sinon à la marge. Ainsi la durée du CDD initial des AESH a été portée à trois ans au lieu d’un an, avec un passage en CDI possible au bout de deux CDD sans interruption de plus de 4 mois entre les deux. Mais ces évolutions sont loin de suffire. Pour Miya, le salaire n’est pas à la hauteur de la quantité de travail fournie. « Pour en faire un métier attractif, il faudrait octroyer aux AESH un statut de fonctionnaire de l’Éducation nationale, une revalorisation de salaire et un réel accès à la formation », détaille Andréa. Selon l’accompagnante, la mise en place des pôles inclusifs d'accompagnement localisés (PIAL) chargés de déployer les interventions des AESH sur plusieurs établissements empire la situation, « car travailler au sein d’un PIAL occasionnerait une perte de salaire, puisque cette organisation limiterait mes disponibilités pour mes autres activités professionnelles ».

Malgré toutes ces réserves, les deux accompagnantes reconnaissent que cette activité d’AESH, à condition qu’elle soit limitée dans le temps, se révèle très formatrice pour qui se projette dans les métiers de l’éducation, du social et de l’accompagnement. Et Andréa de conclure que « c’est un métier magnifique » gâché, pour le moment, par une absence de perspectives d’évolution de carrière.


AESH, un métier qui recrute
À la rentrée 2022, 4 000 recrutements sont prévus pour des postes à temps partiel de 24 heures par semaine en moyenne, et jusqu’à 31 heures dans le secondaire. Pour déposer votre candidature, rapprochez-vous de l’Académie du territoire pour lequel vous envisagez de travailler.
Pour en savoir plus, lisez notre fiche métier.

Odile Gnanaprégassame © CIDJ
Article mis à jour le 01-04-2022 / créé le 01-04-2022