Rebondir Microlycée : reprendre ses études après un décrochage
En bref
- Environ un jeune sur huit quitte le système scolaire sans diplôme ou avec uniquement le brevet des collèges, rendant la recherche d'un emploi stable d'autant plus difficile.
- En France, environ 60 structures de retour à l’école (SRE), dont une trentaine de micro-lycées offrent la possibilité de se réinsérer dans un cadre scolaire.
- L'objectif est double : regagner les études et confiance en soi !
Le micro-lycée, pour se réconcilier avec l’école
À Limoges, au micro-lycée Utrillo, l’enseignante et coordinatrice, Carole Deloustal, arbore fièrement un dragon sur sa porte de bureau, un clin d'œil à la première promotion. « Un dragon, c’est à la fois effrayant par son feu et protecteur envers les plus vulnérables », explique-t-elle. Cette image résume parfaitement l’esprit du micro-lycée : un équilibre subtil entre rigueur et bienveillance.« Si on n’est qu’exigence, on est maltraitant. Si on n’est que bienveillance, on est laxiste. Et dans les deux cas, on n’aide pas l’élève à avancer », tranche-t-elle. Or, l’objectif d’un micro-lycée, c’est bien d’avancer à l’école, en permettant à ses recrues de préparer un bac général ou technologique, plus rarement professionnel, après un décrochage. Élèves en échec ou décrocheurs, jeunes parents, profils atypiques (dyslexiques, autistes, hyperactifs avec troubles de l’attention…) ou avec des troubles psychiatriques : les micro-lycées accueillent les 16-25 ans que l’école ordinaire a perdu de vue. Seules conditions : s’y inscrire de sa propre initiative et avoir un niveau minimum de fin de 3ᵉ. Certains viennent d’une filière professionnelle inachevée. D’autres sont déjà passés par une seconde, une première ou une terminale, mais souvent pour quelques mois seulement. Tous, en tout cas, ont choisi d’être là. À l’image de Benan, ancien élève au micro-lycée de Sénart, qui a mené un parcours scolaire plutôt classique dans un établissement ordinaire avant que tout bascule en 1ʳᵉ. « À mon premier devoir sur table en SVT, j’ai eu 3/20. Un choc. Je n’avais jamais eu cette note de ma vie ». Puis, c’est la dégringolade.
Redonner le goût d'apprendre
« En cours, je m’ennuyais, les relations avec les profs devenaient compliquées. J’étais catalogué comme le cancre, le mauvais élève, rembobine Benan. Pourtant, je travaillais parfois jusqu’à tard le soir, mais ça ne fonctionnait pas. Ça s’est soldé par un échec au bac, mais je ne pouvais pas redoubler dans mon lycée ». À la rentrée suivante, Benan entend parler du micro-lycée, qui par chance, se trouve dans la ville d’à côté. Là-bas, il rejoint une promo d’une dizaine d’élèves qui partage un objectif commun : décrocher le bac. L’enseignement se fait en petit groupe, les professeurs sont donc plus disponibles. Ce qui rend au jeune homme le goût d'apprendre : « on nous encourageait à participer et à poser des questions. J’ai appris à m'intéresser aux mathématiques et j’ai découvert la sociologie que j’ai adorée ». Pour Benan, l’espace scolaire devient aussi un espace d’accomplissement de soi. « J’ai l’impression que ce que j’y ai appris a façonné ma personnalité et même mes goûts d’adultes », analyse-t-il aujourd’hui. Quelques mois plus tard, il repasse le bac et le décroche, cette fois, avec une mention. Il tente un bref passage en licence universitaire avant finalement d’intégrer un BTS commerce en alternance suivi d’un master en achat international et logistique dans une école de commerce. « J’avais l’impression d’avoir déraillé, le micro-lycée m’a remis sur les rails », résume-t-il. Au départ, ce n’était pourtant pas gagné, le jeune homme avait peur de « perdre son temps » et « de ne pas réussir à rebondir après un premier échec ».
Faire retomber la pression de l’évaluation
« Ce qui m’a tout de suite étonné en arrivant, c’est le rapport entre élèves et professeurs. On est considéré comme des adultes », pointe Benan. En micro-lycée, la moyenne d’âge tourne généralement autour de 20 ans. « Il n’y a pas de salle des profs, enseignants et élèves partagent les mêmes espaces. Chaque élève est suivi par un enseignant référent. On donne la priorité à la discussion et au dialogue. Les règlements intérieurs sont aussi plus souples », précise Olivier Haeri, enseignant au micro-lycée de Sénart et délégué général de la Fespi, association qui regroupe les établissements innovants de France. Progressivement, le lien entre élèves et école se retisse. Des dispositifs spécifiques sont souvent mis en place comme des ateliers de pratique culturelle et sportive, des accompagnements sur la méthode de travail, du coenseignement ou des périodes de révision. À côté, le programme, assuré par des professeurs de l’éducation nationale, reste le même que dans un lycée ordinaire. « On les prépare aux mêmes épreuves, mais on essaie de dédramatiser la notation », nuance Rosy Loques, coordinatrice au micro-lycée Benjamin Franklin d'Orléans. En effet, en micro-lycée, l’évaluation des élèves n’est pas nécessairement notée et quand elle l’est, tout est mis en place pour faire retomber la pression. « Par exemple, on donne la possibilité aux élèves de refaire un devoir, même accompagné ou avec le livre à côté, car on est persuadé que c’est ainsi qu’ils pourront progresser », ajoute Carole Deloustal. Faire progresser les élèves et les réintégrer progressivement dans un système qui les a laissés sur le bord de la route ou qu’ils ont rejeté, telle est l’ambition des micro-lycées. Et souvent, ça fonctionne. Olivier Haeri rappelle qu’il y a toujours « un écart, de 10 à 25 % selon les structures, entre le nombre de jeunes inscrits en septembre et ceux qui passeront le bac en fin d’année, mais le taux de réussite des élèves présents à l’examen est semblable à celui des autres lycées ». Autrement dit, ces micro-lycées obtiennent de maxi résultats. Pari tenu
Focus
Où s'inscrire après un décrochage ?
En France, une soixantaine de structures de retour à l’école (SRE) existent. Ces établissements accueillent en petits groupes des jeunes ayant connu une rupture scolaire, souhaitant préparer un diplôme. La plupart préparent aux bacs généraux ou technologiques, tandis que certaines se concentrent sur les terminales, et d'autres proposent des cours dès la classe de seconde ou de première.