Inédit Emploi : vous connaissez la semaine de 4 jours ?
En bref
- Le télétravail fait recette si bien qu’on le présente comme un avantage social dans les annonces d’emploi.
- D’autres organisations du travail émergent comme la semaine de quatre jours et en quatre jours.
- Ces deux modèles visent à améliorer l’articulation entre vie pro et perso.
Semaine de 4 jours ou en 4 jours : une préposition qui change tout
Loin d’être une idée neuve, la semaine raccourcie fait son chemin dans les entreprises depuis quelques années. Mais quand on parle de semaine raccourcie, la préposition a son importance. Dans les années 1990, l’idée d’une semaine de quatre jours émerge et apparaît alors comme une « opportunité de partager le travail dans un contexte de forte augmentation du chômage ». Elle rimait alors avec une réduction du temps de travail hebdomadaire sans baisse de rémunération : les salariés ne travaillaient plus que 32 heures par semaine tout en conservant la même rétribution. Certaines expérimentations récentes reprennent l’idée d’une semaine raccourcie, mais cette fois sans réduction du temps de travail. Ainsi, lorsque Gabriel Attal incite les administrations publiques à tester la semaine en quatre jours, il n’est pas question de diminuer les heures travaillées. Les agents engagés dans cette expérimentation effectueraient le même nombre d’heures sur un temps hebdomadaire moins étendu, ce qui implique une plus grande amplitude horaire journalière. Or, selon une étude du Crédoc et de la fondation The Adecco Group, ces deux organisations du temps de travail n’apportent pas les mêmes bénéfices aux salariés. La moitié d’entre eux affirme qu’ils seraient plus satisfaits par la semaine en quatre jours que leur rythme de travail actuel. Pour un « rythme de travail idéal », les Français évoquent spontanément la réduction du nombre de jours travaillés dans la semaine, avec ou sans réduction du temps de travail (26 %) et la flexibilité des horaires de travail (21 %).
Changer de rythme pour équilibrer les vies professionnelles et personnelles
Les actifs interrogés estiment que ces changements de rythme leur permettraient de bénéficier de plus de temps personnel ou familial (51 %) et d’un meilleur équilibre de vie (43 %). Les familles monoparentales, les femmes, les 25-39 ans et les habitants de grandes agglomérations se révèlent plus intéressés par l’idée de la semaine raccourcie. Les salariés emploieraient ce jour « off » pour se rendre à des rendez-vous médicaux ou administratifs, pour passer plus de temps en famille ou encore pour réaliser d’autres activités (bénévolat, sport…). En revanche, les familles monoparentales et les actifs en situation de handicap se disent moins séduits par la semaine en quatre jours. Les premiers préfèrent sortir plus tôt du travail pour s’occuper de leurs enfants que d’effectuer des journées plus longues , les seconds craignent une dégradation de leur santé physique et mentale, et redoutent des journées plus fatigantes. Sans compter que, pour certains handicaps, l’allongement du temps de travail se révèle incompatible avec l’état de santé. Néanmoins, dans un contexte de fortes tensions sur le marché du travail, les employeurs explorent ces nouvelles possibilités d’organisation pour rendre leurs offres plus attractives, en particulier les entreprises qui ne peuvent pas augmenter le niveau de rémunération. Une manière de fidéliser les salariés, de limiter l’absentéisme et le turn-over. L’une des entreprises interrogées, qui dispose de trois ans d’expérience de la semaine de quatre jours, affirme que « l’absentéisme a été divisé par deux » et que la productivité a grimpé dans certains domaines, alors même que les salariés travaillent un jour de moins.
Des jours en moins, des efforts en plus
Ces nouveaux rythmes de travail pourraient également améliorer l’égalité femme / homme. En effet, 27 % des femmes occupent un poste à temps partiel (7,5 % des hommes), dont 30 % pour s’occuper des enfants. S’engager dans une semaine de / en quatre jours leur permettrait de retrouver un salaire complet tout en gardant le même nombre de journées travaillées. L’étude souligne toutefois que le jour libéré par la semaine raccourcie doit rester le même que celui de l’ancien temps partiel pour que ces salariés adoptent pleinement le nouveau rythme. Même si les semaines raccourcies plaisent aux actifs, il n’en reste pas moins que les employeurs doivent prendre en compte certaines données et conséquences dues aux nouvelles configurations horaires. Dans le cadre de la semaine en 4 jours, l’intensification des rythmes de travail peut entraîner de la fatigue (33 % des salariés) et une diminution de l’adhésion à l’entreprise. Certaines entreprises rapportent même que des salariés demandent un retour à la semaine de cinq jours. Pour les managers, la gestion des plannings se complexifie et entraîne une charge mentale supplémentaire, surtout si le jour libéré diffère selon les salariés. Au niveau environnemental, les bénéfices restent incertains. À grande échelle, les semaines raccourcies représentent une piste intéressante pour réduire l’impact carbone puisque 75 % des actifs se rendent au travail en voiture ou en deux-roues motorisé. L’impact se révèle d’autant plus positif si tous les salariés de l’entreprise bénéficient du même jour « off ». En revanche, la fatigue engendrée par les journées allongées peut entraîner davantage d’achats sur Internet ou de livraison d’aliments de mauvaise qualité. Et d’un point de vue strictement économique, les salariés bénéficiant de tickets restaurant voient leur nombre diminuer quand ceux qui se rendent au travail en voiture réalisent des économies de carburant. Et pour les parents, cela dépend de l’âge de leurs enfants : s’ils ne vont pas encore à l’école, la famille économise en théorie un jour de garde , pour ceux qui sont scolarisés, l’allongement des journées nécessite au contraire un mode de garde complémentaire.