Interview 7 000 personnes contracteraient le VIH chaque année, en France

Isabelle Fagotat Isabelle Fagotat
Publié le 20-06-2018

En bref

  • S’il existe aujourd’hui de nombreux traitements permettant de vivre avec le VIH, la meilleure façon de le combattre reste la prévention. Pourtant, 37 % des lycéens et 54 % des étudiants déclarent ne pas utiliser systématiquement un préservatif. Le point avec Eric Vandemeulebroucke et Agnès Duhamel, médecins au Conseil départemental de Seine-Saint-Denis, interviewés au Centre départemental de prévention et de santé de Montreuil.
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Un couple s'embrasse. Crédit : Pablo Heimplatz

Selon la dernière enquête santé de la mutuelle étudiante Smerep, 37 % des lycéens et 54 % des étudiants déclarent ne pas utiliser systématiquement un préservatif. Il reste pourtant le moyen de contraception le plus efficace pour combattre les infections sexuellement transmissibles (IST) dont le VIH (virus de l’immunodéficience humaine).
En matière de traitement, d'importants progrès ont été réalisés : ils permettent aux personnes séropositives de vivre une vie quasi normale sans contaminer partenaire et enfant. Interview.

Eric Vandemeulebroucke

« Le Sida (syndrome d'immunodéficience acquise) est la maladie provoquée par le VIH, virus de l’immunodéficience humaine. Le VIH s’attaque aux globules blancs (plus spécifiquement aux lymphocytes CD4). Au départ, le corps parvient à les reconstituer mais avec le temps, il n’y arrive plus, c’est là que le Sida apparaît, en général une dizaine d’années après la contraction du VIH. »

Agnès Duhamel

« Le Sida se traduit par l’apparition de maladies opportunistes : certaines bactéries profitent d’une immunité diminuée comme un lierre s’accroche à un arbre moins vigoureux. Se développent ainsi des maladies comme la pneumocystose, la tuberculose, le zona, certains cancers… »

Agnès Duhamel et Eric Vandemeulebroucke

AD

« Toutes les relations sexuelles exposent au VIH. Les pénétrations vaginales ou anales non protégées comportent les risques les plus importants. En ce qui concerne les rapports oraux génitaux, les risques sont extrêmement faibles. En consultation, on me demande régulièrement si le VIH se transmet par le baiser. La réponse est non. »

EV

« La deuxième grande voie de transmission est la voie sanguine. Le partage de seringues entre toxicomanes par exemple comporte des risques. Les risques de transfusion sont en France très faibles. Il faut par contre éviter les transfusions dans les pays en voie de développement. »

AD

« La troisième voie de contraction du VIH est la transmission mère – enfant. La grossesse est un état où l’immunité est plus faible et le virus en profite : si la mère n’est pas traitée, le virus passe une fois sur trois. Mais si la mère est traitée le VIH ne passe pas à l’enfant. En France, le risque de transmission par cette voie est extrêmement faible, excepté pour les femmes en vulnérabilité sociale qui ont plus de mal à suivre correctement leur traitement. »

EV

« Oui, quasiment tous les séropositifs sont traités en France. Aujourd’hui, on peut être porteur du VIH et mener une vie presque normale. »

AD

« Il n’existe pas de vaccin. Le meilleur moyen de prévention reste le préservatif (masculin ou féminin). Il est important de bien savoir le placer, en particulier le préservatif masculin, pour qu’il ne craque pas. Il est pour cela conseillé d’utiliser un lubrifiant (à base d’eau). »

EV

« Il existe ce que l’on appelle "la prévention diversifiée" : le fait par exemple de traiter la femme enceinte protège son bébé. Le TASP (Traitement d’une personne séropositive comme Prévention) fait également partie de ce dispositif : en traitant une personne séropositive, le partenaire est protégé.
Autre dispositif :  la PrEp. Il s’agit d’un traitement pré-exposition. Il est délivré à des personnes à haut risque, prioritairement des hommes homosexuels, qui ont plusieurs partenaires, ont des rapports non protégés ou prennent de la drogue pendant le rapport. »

AD

« Il est important de se faire dépister régulièrement. Quand on a une vie de couple stable, un dépistage au début de la relation suffit. Quand on a plusieurs partenaires, 4 dépistages par an sont recommandés. »

EV

« Oui, si on a eu un rapport non protégé ou qu’il y a eu un accident comme un préservatif qui « craque », il existe un traitement post-exposition : il doit se prendre le plus tôt possible, dans les 4 heures, et jusqu’à 48 heures après. »

AD

« Il y a les chlamydiae qui se transmettent surtout au début de la vie sexuelle, vers 20-25 ans, les gonocoques qui sont les agents de la « chaude pisse », la syphilis, le papillomavirus et l’hépatite B. »

EV

« Les autres IST comme les chlamydiae, la syphilis, les gonocoques, le papillomavirus et l’hépatite B se transmettent par relations sexuelles, qu’ils s’agissent de pénétrations vaginales et anales et de rapports oraux génitaux. L’hépatite B ou la syphilis peuvent aussi se transmettre au cours d’un baiser. »

AD

« Les chlamidiae et les gonocoques, s’ils ne sont pas traités, peuvent provoquer la stérilité, la syphilis des complications au niveau du cerveau, des nerfs, du cœur et des yeux. Le papillomavirus peut provoquer le cancer du col utérin. »

EV

« Contre le papillomavirus, il existe un vaccin qu’il est recommandé de faire avant les premières relations sexuelles. Il peut être inoculé à partir de 9 et jusqu'à 19 ans révolu. Contre l’hépatite B aussi, il est conseillé de se faire vacciner.
Contre les autres IST, le dépistage régulier est recommandé. Si on découvre une IST, on propose un traitement dit « minute » administré en une seule prise (comprimés antibiotiques, injections de pénicilline) qui guérit complètement l’infection. »

AD

« Pour bénéficier d’un dépistage ou d’un traitement, on peut aller dans un centre gratuit d’information de dépistage et de diagnostic (Cegidd). Il y en a dans de nombreuses villes (Toulouse, Rennes, Cannes, Agen,…). En Seine-Saint-Denis et en Essonne, il existe aussi les centres départementaux de prévention santé (CDPS) comme celui de Montreuil.
Les centres de planification familiale proposent aussi des dépistages des IST. Ces divers centres proposent des dépistages anonymes et gratuits. On peut aussi s’adresser à son médecin traitant. »

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