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Séjour adapté : un job d’été auprès du public en situation de handicap
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Avec ou sans diplôme spécialisé, certains jeunes font le choix de travailler sur des séjours qui accueillent des personnes porteuses de handicap. Alliant animation et aide à la personne, ces colonies peu ordinaires sont aussi l’occasion de s'investir dans un job qui a du sens. Témoignages.
Été 2021. Après une année de cours à distance, je décide de mettre à profit mon temps libre et je postule à un « séjour adapté ». Je ne possède alors aucune compétence ni dans le domaine de l’animation (je n'ai jamais pris le temps de passer mon BAFA) ni dans celui de l’aide à la personne. En réalité, un mois auparavant le terme « séjour adapté » ne faisait pas partie de mon vocabulaire. Mais je me suis lancée : j’avais besoin d'argent, j’éprouvais l'envie de quitter mon quotidien d’étudiante en journalisme tout autant que le désir de me rendre utile. Et pour Fanny, Laure, Orlane et Raphaël, ce fut pareil. À eux de mettre d'autres mots que les miens sur une expérience hors normes.
Une colonie de vacances un peu spéciale
« Quand j’ai commencé ma vie professionnelle, j’avais une collègue qui, chaque été, envoyait des cartes postales de ses séjours adaptés. C’est grâce à elles que j’ai souhaité me lancer. » Et Orlane a tout juste 20 ans lorsqu’elle postule à une offre d’animatrice en séjour adapté. Elle embarque sur celui de Perros-Guirrec en Bretagne avec, dans ses bagages, sa formation d'aide-soignante.
Sur le papier, les séjours adaptés ressemblent beaucoup aux colonies de vacances. Ainsi, pour août prochain, le site de l’association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) propose divers séjours : « Au centre des Sables-d’Olonne seront organisés des activités diverses, baignade à la piscine, musique, danses, déguisement, maquillage, jeux de société, soirées exceptionnelles, participation aux festivités et fêtes locales… » Mais ces colonies ont une petite particularité : à destination de mineurs ou d’adultes, par petits ou grands groupes, elles sont réservées aux personnes présentant tous types de handicaps.
Un emploi du temps polyvalent
Si le descriptif des séjours adaptés rappelle les vacances, le rythme y est nettement plus soutenu pour l'équipe. En fonction de la localisation du séjour et du public accueilli, le quotidien des animateurs varie. En revanche, tous enchaînent les activités tournées vers l'animation et l'encadrement du groupe, avec des visites, des balades, des moments consacrés aux jeux de société, sans compter les tâches manuelles. La toilette, l'aide à la douche et à la prise de repas, quand ce ne sont pas aussi les médicaments...
En guise de formation, Fanny, originaire du Morbihan, a passé les deux jours précédant son séjour avec ses nouveaux collègues : « Le directeur et son adjoint nous ont montré les gestes nécessaires, comme le transfert d’une personne du lit à son fauteuil roulant, ou comment l'aider à prendre sa douche ou aller aux toilettes. » Des missions qui touchent à l’intime, pas toujours évidentes à réaliser lorsque l’on a à peine 20 ans : « Si une personne n’est pas à l’aise avec l’idée de changer une protection hygiénique, elle peut demander de l’aide ou des conseils aux autres collègues. C’est important, la cohésion de groupe », insiste la jeune vingtenaire.
Pour Orlane, c’est plutôt l’animation qui lui a donné du fil à retordre : « Je ne suis absolument pas manuelle, et je laisse mes collègues s’occuper de ce domaine ! », reconnaît la jeune pompière volontaire, qui a pu en échange transmettre son savoir-faire à son équipe.
L'argent ne fait pas le moteur
Travailler dans l’animation, c’est accepter une faible rémunération. Les colonies de vacances, ça ne paye pas. Ici, les contrats promettent en moyenne de 35 à 45 euros/brut de l’heure, avec des pauses quasi inexistantes et des temps de préparation à réaliser souvent tard le soir. Sur ce point, Fanny reconnaît qu’elle n’a pas choisi de participer aux séjours pour l’aspect financier : « Ça me permettait de gagner un peu d’argent en tant qu’étudiante, mais j’ai surtout continué pour retrouver la bonne ambiance de l’équipe. »
D’autres, comme Raphaël, se sont lancés sans formation : « J’ai compris que je n’avais pas nécessairement besoin de compétences pour postuler. On m’a dit : le plus important est de savoir faire preuve d’empathie ! » Il y a cinq ans, lorsque le jeune Lorrain entreprend son premier séjour, il n’avait qu’un CAP Petite Enfance à son actif. « Je suis arrivé en renfort 24h avant le début du séjour seulement. J’avais forcément quelques appréhensions, surtout sur ce qui concernait la toilette des vacanciers, mais ça m’a tout de suite plu. » Un coup de cœur personnel qui a évolué en vocation professionnelle : « Depuis octobre dernier, je me suis lancé dans une formation d’AES, d’accompagnant éducatif et social. J’ai envie d’aider des personnes en situation de handicap au quotidien. »
Découvrir un autre public
Pour Laure, 23 ans aujourd’hui, c’est la volonté de découvrir un public différent qui fût le déclic. Car, à 19 ans, la néo-ergothérapeute n’avait pas encore travaillé auprès des personnes en situation de handicap, c’était l’occasion de se sensibiliser sur le sujet. De quoi passer de la théorie à la pratique, et de mettre en place des techniques apprises à l’école. « Au fur et à mesure des différents séjours, j’ai acquis des réflexes utiles à ma pratique d’ergothérapeute. J’ai l’impression d’être désormais plus légitime. »
Fanny, qui s’est rendu compte une fois le BAFA en poche qu’elle n’aimait pas travailler au contact des enfants, estime que les « séjours adaptés » permettent de se rendre compte que le handicap n’est pas un frein pour tout, car les résidents passent des vacances comme les autres ! » La plus grande des victoires vient de la satisfaction palpable des vacanciers à la fin du séjour. Et Laure d’ajouter qu’elle s’est « réellement rendu compte du bien-être que cela peut leur apporter lorsqu’à la fin des vacances », elle a vu un monsieur, « qui n’avait presque aucune interaction avec nous, se détendre et sourire. C’était hyper gratifiant. »
Une aventure personnelle
Alors, concilier destination estivale et job d'été, ne serait-ce pas le combo parfait ? « Ce n’est pas vraiment reposant, mais ça permet de découvrir de nouveaux paysages », avance Orlane. Car, pour son premier séjour, la jeune originaire du Jura a traversé la France pour rejoindre Perros-Guirec, en Bretagne. Laure a, elle aussi, sillonné la France, du côté de Grenoble. À la fin de son expérience, l’ergothérapeute a été agréablement surprise par sa propre énergie : « Je me suis rendu compte que je n’avais pas autant besoin de sommeil que cela, et surtout que j'aimais vivre en communauté. »
Tous et toutes s’accordent sur un point : leurs séjours les ont fait grandir. Fanny a gagné en confiance en elle, car « à 19 ans, on devient la référente d’un vacancier, son principal repère pendant le séjour. C'est effrayant, mais ça nous demande à être 100% autonome. » Avec une dizaine de séjours à son effectif, Raphaël ne compte pas s’arrêter là : « La vie quotidienne en séjour est complètement différente du reste de l’année. Elle m’apporte de la joie, tout simplement. »
Plus prosaïquement, sur un CV, ce type d’expérience représente une plus-value appréciée. « C’est un détail qui interroge les futurs recruteurs », affirme Fanny. Ça les impressionne, car ils savent que ce n’est pas un job facile ». Pas facile, mais porteur de sens : en travaillant pour un séjour, Laure a suivi les traces de sa mère, engagée depuis longtemps dans une association qui œuvre pour le handicap. Dans le regard de ses proches, la jeune femme a vu la fierté et l’admiration s’entremêler : « On m’a dit que c’était incroyable ce que je faisais, mais au fond est-ce si exceptionnel de prendre soin des autres ? »
Perrine Basset © CIDJ
Article mis à jour le 26-05-2023
/ créé le 26-05-2023
Crédit photo : Small Giant - Unsplash