Actualité En Italie, la pilule contraceptive devient gratuite
En bref
- Malgré l’opposition du gouvernement conservateur, l’Agence italienne des médicaments (AIFA), a voté la gratuité de la pilule contraceptive. Le mesure, véritable avancée pour la liberté des femmes à disposer de leur corps, doit entrer en vigueur dans les prochaines semaines.
Vers la gratuité de la contraception orale en Italie pour toutes les femmes ? C’est en tout cas en bonne voie. Le Comité de tarification et de remboursement (CPR) de l’Agence italienne des médicaments (Agenzia italiana del farmaco ou AIFA) a voté le 22 avril 2023 en sa faveur ainsi que pour la gratuité du traitement préventif contre le VIH (PrEP). La mesure doit encore être examinée par le conseil d’administration de l’AIFA avant d’être publiée à la Gazzetta Ufficiale de la Repubblica Italiana (le journal officiel italien). Elle concernera certaines marques de pilules. Si la contraception orale gratuite était jusqu’à présent réservée aux seules jeunes femmes dans quelques provinces italiennes via le planning familial, la généralisation de la gratuité à toutes les femmes et sur tout le territoire est une avancée majeure.
Une mesure pour toutes les femmes à 140 millions d’euros par an
La gratuité de la pilule contraceptive sans limites d’âge permettra à un plus grand nombre de femmes d’y avoir recours. Le dernier rapport national de l’AIFA sur «?L’utilisation des médicaments en Italie?» indique que l’Italie «?n’est pas un pays avec une longue tradition de planification de la grossesse et, à ce jour, comparé à d’autres pays européens, présente les niveaux les plus bas d’utilisation de la contraception moderne?». Selon les données de l’AIFA, environ 2,5 millions de femmes prennent la pilule.
«?Le coût (de cette mesure) estimé pour l’État est d’environ 140 millions d’euros par an, mais il s’agit d’une décision importante, qui permettra d’élargir le public des femmes qui, aujourd’hui, considéraient peut-être le coût de ces contraceptifs comme trop élevé et ne les utilisaient donc pas?», a déclaré Giovanna Scroccaro, présidente du CPR de l’AIFA, à Quotidiano Sanità.
Une mesure diversement accueillie
Favorablement accueillie par le parti démocrate et par l’alliance des verts et de la gauche, la mesure a été, en revanche, très critiquée par le parti d’extrême droite de Giorgia Meloni à la tête du gouvernement et les associations pro-vie. Alors que l’Italie est confrontée à une baisse importante du nombre de naissances, les associations favorables à la natalité ont souligné que la mesure allait à l’encontre de la politique de natalité soutenue par le parti conservateur. Vent debout contre cette décision, elles avancent que la pilule gratuite est « grave et dangereuse » (Mouvement italien des parents) et qu’il ne faut pas la banaliser, car elle peut avoir de « graves effets secondaires physiques et psychologiques qui peuvent conduire à la dépression et à des instincts suicidaires » (Pro Vita & Famiglia).
De surcroît, toujours selon ces associations pro-vie, « les ressources utilisées auraient pu être affectées à l’amélioration de la situation des familles ayant des enfants handicapés qui ont besoin de médicaments très coûteux qui ne sont pas fournis gratuitement » (Family Day). Sur la même longueur d’onde, le ministère de la Santé a, quant à lui, sommé l’AIFA de revenir sur sa décision estimant qu’il y a « bien d’autres priorités sociales et de santé à gérer en Italie ».
Peine perdue… L’AIFA étant un organisme indépendant, le ministère de la Santé ne pourra pas interférer sur la décision de l’AIFA. Après l’assouplissement des conditions d’utilisation de la pilule abortive en 2020, l’Italie continue de progresser quant aux droits des femmes à disposer de leur corps. Des avancées majeures, pour ce pays de tradition catholique où le droit à l’avortement, bien que reconnu en 2018, peine toujours à s’appliquer. 67% des gynécologues italiens refusent de pratiquer l’avortement et ce chiffre peut même grimper jusqu’à 80% dans certaines régions.